Le numérique à l’école : y croire ou pas ?

L’informatique est déjà partout, et les nouvelles technologies débarquent petit à petit dans les collèges et lycées. À quoi servent-elles ? Les réponses sont nuancées.

Pour : Les outils numériques indispensables à l’école

Tableaux blancs interactifs, manuels numériques, réseaux wifi, espaces numériques de travail (ENT)… Aucun doute, les Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Education poussent la porte des établissements scolaires. Pour Jean-Michel Fourgus, député-maire d’Elancourt et auteur d’un rapport sur le sujet, le numérique est l’avenir de l’enseignement. Les écoles élémentaires de sa commune sont dotées à 100 % de TNI (Tableaux Numériques Interactifs). Selon lui, la pédagogie du numérique est incontournable : « L’enseignement est plus constructif. Le professeur devient metteur en scène et l’élève acteur de son éducation. L’objectif est de sortir de la pédagogie frontale. » En « redonnant du plaisir aux jeunes », l’effet sur leurs problèmes scolaires est immédiat : l’utilisation du numérique devient un moyen efficace pour vous motiver, améliorer votre concentration et vous faire participer !

Une fausse bonne idée ?

Mais si les classes deviennent entièrement équipées en TICE, d’autres questions se posent. Pour Pascale Gossin, maître de conférences à l’université de Strasbourg, « Les enseignants ont parfois du mal à maîtriser certains outils : cela leur demande de passer beaucoup de temps hors de la salle de cours pour créer un contenu pertinent. » Autre point d’interrogation : les outils numériques favorisent-ils l’apprentissage des élèves ? Selon elle « Scientifiquement, ce n’est pas démontré. Tout dépend du profil des élèves. Sur une expérimentation que j’ai menée dans plusieurs classes de seconde, seuls 30 % des élèves tiraient un bénéfice de l’utilisation d’outils numériques. »

Alors, faut-il abandonner le cours magistral pour un cours interactif basé sur les outils numériques (serious game, TNI…) ? Axer l’apprentissage sur un plan plus « émotionnel » qu’intellectuel ? Selon Hélène Michel, directrice de la recherche à l’Ecole Supérieure de Commerce de Chambéry, « Il existe en France un problème culturel. L’enseignant détient une vérité et déroule son cours. Il n’a pas l’habitude des mises en situation. » Ce décalage culturel ne peut cependant expliquer à lui seul le retard et les réticences en France concernant les équipements en nouvelles technologies.

Le numérique à l’école : les préconisations

Le 15 février dernier, le député des Yvelines Jean-Michel Fourgous a remis au ministre de l’Éducation nationale son rapport sur le développement du numérique dans l’enseignement scolaire. D’après lui, les TICE (Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Education) rendent plus attractives les disciplines scientifiques ainsi que l’apprentissage des langues étrangères. Afin de développer le numérique sur tout le territoire, le rapport préconise 12 priorités et 70 mesures, parmi lesquelles :

– La connexion en haut débit de 100 % des établissements scolaires d’ici à 2012 et en très haut débit après, ainsi que la généralisation des tableaux numériques interactifs.

РLa formation des enseignants aux outils et services num̩riques.

– La création d’espaces interactifs dans les établissements scolaires, et de nouveaux supports interactifs et autres manuels numériques innovants.

РLe d̩veloppement des ENT (environnements num̩riques de travail).

Plus d’infos sur la mission parlementaire de modernisation de l’école par le numérique : http://www.reussirlecolenumerique.fr/

Quelques chiffres…

75 % des collèges et lycées sont aujourd’hui connectés en haut débit

6 % des classes des établissements secondaires sont équipées de TNI (tableaux numériques interactifs)

94 % des enseignants utilisent des outils numériques pour préparer leurs cours

Témoignages :

Gaspard, 14 ans, en 3e

« Il y a au lycée des tableaux numériques interactifs mais, dans notre classe, nous n’avons pas trop accès à ce genre de technologies. À part les initiations en technologie, le numérique est plutôt absent de nos cours. C’est dommage. Je crois que personne ne peut se passer de l’informatique. Et cela rendrait certains cours plus intéressants et plus interactifs, comme les langues ou les matières scientifiques. Mais je ne suis pas pour une école 100 % numérique. Il ne faut pas qu’il y ait trop de cyber-relations, il faut garder le contact humain. »

Antonin, 18 ans, en terminale ES

« Le numérique n’est pas présent en classe. En fait, nous utilisons surtout nos ordinateurs pour les travaux individuels. Par exemple en cours de langues : pour préparer les oraux, nous nous enregistrons sur l’ordinateur avant de nous réécouter. On progresse bien de cette façon. Sinon, nous avons sur internet des blogs et des forums où nos profs mettent en ligne des corrigés de contrôles et des épreuves de bac blanc. »

Mélodie, 22 ans, en master 1 Recherche en art contemporain

« À la fac, on travaille encore « à l’ancienne ». Mis à part les power point ou les rétroprojecteurs, il n’y a rien de numérique dans notre enseignement. Je le regrette car on y gagnerait beaucoup de temps pour la compréhension. En histoire de l’Art, des logiciels existent qui rendent les enseignements plus constructifs. Mais le vrai problème est le manque de moyens à l’université. Nous pouvons perdre une demi-heure de cours à cause d’une clé usb, d’un matériel inadapté ! »

Par Angela Portella, avec Romain Giry



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